Les 10 grands groupes du prolétariat

1. Prolétaires « inactifs »
[1 600 000]
2. Prolétaires « hors lois »
[40 000]
3. Manœuvres et journaliers
[200 000]
4. Opérateurs et ouvriers spécialisés (OS)
[300 000]
5. Employés d’exécution
[1 050 000]
6. Employés dans les services publics
[195 000]
7. Ouvriers qualifiés dans les services publics
[10 000]
8. Ouvriers qualifiés dans la construction
[130 000]
9. Ouvriers qualifiés dans la production
[140 000]
10. Techniciens dans la production et les services publics
[755 000]
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Il y a 5 622 000 prolétaires au Québec, soit 67 % des 8 390 000 personnes qui y habitent. Sur cette population totale, 4 255 550 personnes âgées de 15 ans et plus sont considérées comme « actives », toutes classes sociales confondues. Par « actives », il est entendu que ce sont des personnes en emploi ou activement à la recherche d’un emploi. Sur ce nombre, on recense 2 801 860 prolétaires actifs qui sont dispersés dans des centaines d’emplois différents sur le territoire. Ce sont ces 2 801 860 prolétaires actifs, en plus des 1 600 000 prolétaires inactifs âgés de 15 ans et plus, qui composent ce que nous appelons les 10 grands groupes du prolétariat. Ces grands groupes représentent donc l’ensemble des travailleurs et des travailleuses au Québec qui, chaque jour, extraient, transforment, fabriquent, assemblent, construisent, entreposent, transportent et vendent la totalité des richesses contenues dans la société.

La notion de grands groupes permet de cerner le prolétariat à la fois dans sa diversité et dans son unité. Bien que les travailleurs qui composent les grands groupes aient des fonctions, des tâches ainsi que des conditions de travail et d’existence différentes, ils sont tous reliés : ils participent au même procès social de travail qui fait fonctionner la société telle que nous la connaissons. Chacun des 10 grands groupes du prolétariat réalise un segment distinct de ce procès de travail. Le concept de grands groupes permet donc de saisir ce procès dans sa totalité et de le décortiquer afin d’en comprendre le fonctionnement. Bref, cette notion englobe la somme de travail effectué sur le territoire québécois et permet de comprendre l’exploitation du prolétariat sous toutes ses coutures. Malgré leurs différences, les dix grands groupes forment une grande classe sociale unique qui partage un intérêt commun : la prise du pouvoir et l’édification du socialisme.

1. Prolétaires « inactifs » [1 600 000]

Les prolétaires inactifs ne sont pas présents sur le marché du travail. On y retrouve les retraités prolétariens, les femmes et les hommes du prolétariat au foyer, les personnes de 15 ans et plus sans emploi qui dépendent d’un ménage prolétarien ainsi que les assistés sociaux. Bien qu’ils ne participent pas activement au procès de travail, ils forment une composante importante et nécessaire du prolétariat. Une bonne partie des inactifs sont des retraités (817 000) qui ont quitté le procès de travail après y avoir participé toute leur vie. Dans un ménage, un membre peut être inactif pour s’occuper des enfants, des personnes handicapées, des malades ou des vieillards. Quant aux assistés sociaux (300 000), plusieurs d’entre eux ne sont pas suffisamment fonctionnels pour être rentables économiquement sous le capitalisme et pour obtenir un salaire. Que ce soit à travers le versement des pensions de retraites, le partage d’un salaire ou le versement du « bien être social », ce groupe reçoit, pour survivre, une partie de la valeur créée par le prolétariat. Ce partage est nécessaire pour faire vivre l’ensemble du prolétariat avec ses retraités, ses familles, ses inaptes, etc.

2. Prolétaires « hors lois » [40 000]

Les prolétaires « hors lois » sont les travailleurs qui n’ont pas accès aux normes minimales du travail. On y retrouve les travailleurs au noir, payés dans bien des cas en dessous du salaire minimum. Ce travail au noir peut être réalisé à domicile, dans des services rendus comme la distribution et l’entretien paysagé, ou encore dans des lieux de travail « officiels » comme des garages ou des entrepôts, lesquels engagent souvent une main-œuvre mixte composée de légaux et de « hors-lois ». On retrouve aussi, dans ce grand groupe, les travailleurs sans statut qui ne sont ni au chômage, ni sur l’aide sociale et qui n’apparaissent pas dans les statistiques officielles. Bien qu’exécutant des tâches qui sont aussi réalisées « légalement » par les prolétaires d’autres grands groupes, les prolétaires « hors lois » sont à distinguer des autres en raison des conditions dans lesquelles ils travaillent. L’existence de ce grand groupe témoigne de la facilité avec laquelle le capitalisme outrepasse les normes minimales du travail; elle rappelle le combat historique pour l’amélioration des conditions d’existence et de travail du prolétariat dans son ensemble. Et ce combat est toujours d’actualité.

3. Manœuvres et journaliers [200 000]

Les manœuvres et journaliers sont des prolétaires sans formation particulière œuvrant dans la production. On retrouve, dans ce groupe, les manutentionnaires, les commis d’entrepôt, les débardeurs, les préposés à la production et les ouvriers agricoles. Cette main–d’œuvre est présente à tous les points de jonction dans la production, de l’extraction au transport, en passant par la fabrication et l’entreposage. Elle opère une réalisation simple, souvent en déplaçant les marchandises, en récoltant à main nue ou encore en préparant la matière qui sera transformée et assemblée dans la production. Une partie importante du déplacement des marchandises est opéré à bout de bras ou à l’aide de transpalettes. On retrouve aussi, dans ce groupe, les travailleurs utilisant des chariots élévateurs ainsi que d’autres dispositifs mécaniques permettant d’économiser l’espace d’entreposage. Le déplacement de marchandises constitue souvent l’essentiel du travail des manœuvres et des journaliers. Il est parfois accompagné de tournées sur les différentes stations de travail pour alléger le fardeau de tâches des autres travailleurs. Leur tâche peut aussi consister en un travail de préparation pour accélérer la production.

4. Opérateurs et ouvriers spécialisés (OS) [300 000]

Les opérateurs et les ouvriers spécialisés sont des prolétaires œuvrant dans la production qui sont confinés à une seule tâche, qui opèrent une machine du matin au soir, ou encore qui occupent un poste spécialisé sur une chaîne de montage. En général, ils n’ont aucune formation particulière autre que la maîtrise de la machine à opérer. Ce grand groupe est présent dans l’extraction, la transformation et la fabrication. On y retrouve des opérateurs de machines œuvrant dans des industries telles que la métallurgie, les produits chimiques, les pâtes et papiers, le textile, le plastique, l’emballage ou encore l’alimentation. Aussi, les ouvriers spécialisés se consacrent parfois à l’assemblage sur des chaînes de montage variées, allant de la fabrication de matériel électronique à la fabrication d’automobiles. D’autres ont des tâches spécialisées comme celle de contrôler et de vérifier la qualité d’un produit fini à l’issue d’une opération ou d’une chaîne de montage. Globalement, ce grand groupe est celui qui est lié le plus directement aux machines, ces moyens de production collectifs permettant une productivité décuplée. En cela, les opérateurs et les OS représentent déjà une base matérielle à la réalisation du socialisme.

5. Employés d’exécution [1 050 000]

Le terme exécution fait ici référence au fait que ces prolétaires exécutent ce qu’on leur dit de faire pendant leur quart de travail. Les employés d’exécution sont présents dans la restauration, la vente, le commerce, l’entretien ménager, l’hôtellerie, le transport, l’entreposage, etc. Ce sont, par exemple, les commis dans les magasins, les épiceries, les pharmacies et les autres commerces. Une grande partie du travail réalisé par les employés d’exécution est lié à l’écoulement cyclique des marchandises provenant de la sphère de la production. On retrouve donc, dans ce groupe, les caissières, les vendeur, les garnisseurs de tablettes, les pompistes, les téléphonistes, les représentants des ventes, et tout le personnel de soutien des ventes et du service à la clientèle. Le travail d’exécution prend aussi la forme de services « privés ». Ceux-ci demandent souvent une certaine qualification, comme dans le cas des coiffeuses et des esthéticiennes. Certains exécutent d’autres types de tâches, comme par exemple les portiers, les femmes de chambre, les serveuses, les plongeurs, les commis de bureau, etc.

6. Employés dans les services publics [195 000]

Les employés dans les services publics sont les prolétaires travaillant dans le système public (hôpitaux, centres d’hébergement, centres de jour, transports en commun, appareil d’État, etc.) ainsi que dans les principales utilités publiques (Hydro-Québec, Énergir, etc.). Bien que ces travailleurs s’adonnent à un travail d’exécution, leur réalité est différente de celle des autres employés d’exécution, tant sur le plan des conditions de travail qu’au niveau de l’organisation syndicale. Dans l’histoire du Québec, les employés dans les services publics ont eu une activité syndicale particulièrement forte. On retrouve, dans ce grand groupe, les travailleurs des établissements de santé tels que les préposées aux bénéficiaires, les infirmières auxiliaires, le personnel d’entretien, les employés de cuisine, etc. On y retrouve également les employés d’exécution dans les écoles et dans les centres de la petite enfance tels que les concierges, les cuisiniers, les assistantes, etc. On peut aussi compter parmi eux les gardiens de parc, les employés de la Sépaq, les employés du triage dans les postes, certains éboueurs et déneigeurs, les réceptionnistes, les agentes administratives et bien d’autres employés de la fonction publique.

7. Ouvriers qualifiés dans les services publics [10 000]

Les ouvriers qualifiés dans les services publics possèdent une qualification particulière en plus d’exercer un emploi exigeant leur force physique et leur dextérité. Ce sont des travailleurs manuels qui possèdent un métier pouvant être lié à un autre grand groupe d’ouvriers qualifiés comme celui de la production ou encore celui de la construction. Ce qui les distingue, c’est qu’ils sont tout simplement engagés dans la fonction publique. Par conséquent, ils bénéficient de conditions de travail souvent meilleures que les ouvriers qualifiés qui œuvrent dans le même domaine, mais dans le privé (échelles salariales, stabilité et sécurité d’emploi, régimes de retraite, vacances et fériés payés, horaires fixes, etc.). Le plus souvent, ils travaillent dans l’entretien et la réparation des routes, des aqueducs, des centres d’épuration des eaux, des piscines publiques, des centres municipaux de loisirs, des centres de santé et de services sociaux, des centres d’hébergement de soins de longue durée, des hôpitaux, des commissions scolaires, des écoles publiques, des parcs, etc. Ils participent aussi à la mise en place de nouvelles utilités publiques comme le font, par exemple, les monteurs de lignes pour le transport de l’électricité.

8. Ouvriers qualifiés dans la construction [130 000]

Les ouvriers qualifiés dans la construction sont les prolétaires qui érigent des bâtiments et des infrastructures grâce à un savoir-faire qu’on appelle un métier ou encore une occupation. Chacun de ces métiers nécessite une formation dans une école de métier et un entraînement parachevé au moyen d’une expérience pratique et prolongée de travail. Les ouvriers qualifiés dans la construction construisent des édifices résidentiels, commerciaux et industriels, en plus de réaliser les projets de génie civil. Les briqueteurs-maçons, les charpentiers-menuisiers, les ferrailleurs, les grutiers, les électriciens, les plombiers, les plâtriers, les couvreurs, et plus encore, font partie de ce groupe. Ils bâtissent les endroits où le prolétariat vit et reproduit sa force de travail. Ils bâtissent aussi les lieux où l’on produit et où l’on écoule les marchandises de même que les routes et les chemins de fer sur lesquels on les transporte, et ce, en plus des lieux qui hébergent les services publics et privés. Les ouvriers qualifiés dans la construction ont été présents dans de nombreux combats dans l’histoire du Québec et du Canada, tout comme ils ont eu un rôle actif dans la syndicalisation.

9. Ouvriers qualifiés dans la production [140 000]

Que ce soit dans les secteurs de l’extraction, de la fabrication, de la transformation ou de l’assemblage, il existe un nombre important de machines, de moteurs et d’appareils en tout genre requérant un savoir-faire supérieur à celui des ouvriers spécialisés pour être programmés, opérés, entretenus en permanence et réparés de manière ponctuelle. Les ouvriers qualifiés dans la production sont des ouvriers de métier comme les machinistes, présents dans divers domaines industriels (automobiles, aéronefs, plastique, etc.), ou encore les tôliers et les chaudronniers dans l’industrie métallurgique. Une bonne partie des ouvriers qualifiés dans la production sont aussi des mécaniciens, des électromécaniciens, des soudeurs et des outilleurs-ajusteurs qui prennent en charge l’installation et le bon fonctionnement des moyens de production. Ces ouvriers s’occupent des mécanismes de chaînes de montage dans les usines, des systèmes de réfrigération dans les entrepôts, et de tout autre équipement industriel. Dans ce grand groupe, figurent aussi les ouvriers qualifiés œuvrant dans le transport et la circulation des marchandises comme le sont les conducteurs et les réparateurs d’équipement lourd, de locomotives et de semi-remorques.

10. Techniciens dans la production et les services publics [755 000]

On entend par technicien un prolétaire dont la fonction principale réside dans l’application d’une technique ou d’un ensemble de techniques découlant de diverses sciences. Ces techniques peuvent consister à utiliser des procédés industriels et d’ingénierie, à administrer des soins, à utiliser du matériel médical, ou encore à se servir de logiciels et de réseaux informatiques. Les techniciens sont présents dans les secteurs que sont les sciences naturelles et appliquées (la plupart du temps liées à la production), la santé (hygiénistes dentaires, infirmières, inhalothérapeutes, ambulanciers, etc.) et les services sociaux, éducatifs et juridiques (enseignements au primaire et au secondaire, éducatrices à l’enfance, éducateurs spécialisés, techniciens juridiques, etc.). Bien qu’ils aient une formation collégiale, et même parfois une formation universitaire, ils demeurent des travailleurs salariés ne possédant pas leurs propres moyens de production et n’ayant pas un rôle de direction dans le procès de travail. Dans la production, les techniciens sont souvent sous la direction d’ingénieurs. Ce dernier grand groupe représente le dernier segment de la division sociale du travail, soit la dernière fonction dans le procès de production.