COVID-19 : des événements qui nous révèlent que nous sommes dans l’antichambre du socialisme

Les mesures extraordinaires que mettent en place depuis maintenant plus d’une semaine les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral du Canada pour lutter contre la pandémie de COVID-19 sont révélatrices du haut niveau de développement des forces productives au pays et montrent à quel point lorganisation capitaliste de la société est rendue archaïque. En effet, si la bourgeoisie parvient, de manière aussi rapide, à réaliser les changements d’envergure auxquels on assiste en ce moment (réorganisation de la production industrielle nationale, réorganisation du réseau de la santé, fermeture des écoles et des garderies, fermeture des centres commerciaux, des salles à manger de restaurants, des bars, des cinémas et de plusieurs autres lieux de rassemblement, etc.), c’est parce que la socialisation de la production et la concentration économique sont très avancées au Canada. Aussi, la vitesse à laquelle les mesures dictées par la santé publique ont été appliquées par la population (limitation des rassemblements, confinement, etc.) témoigne de la facilité avec laquelle des directives centralisées, dans des conditions économiques comme les nôtres, peuvent être mises en œuvre lorsqu’elles sont acceptées par les masses populaires.

En fait, la situation actuelle révèle, encore plus clairement qu’à l’habitude, qu’avec un niveau de concentration économique aussi élevé qu’au Canada et qu’avec la somme considérable de connaissances, de techniques et de moyens qui accompagnent nécessairement un tel niveau de concentration, il serait relativement facile de solutionner l’ensemble des problèmes de la société (pauvreté, chômage, crises économiques, corruption, gaspillage, maladies, manque de services, pénuries, etc.) et de répondre à l’ensemble des besoins du peuple en mettant en place une planification centralisée et en mobilisant les masses populaires. En fait, si cela ne se produit pas, c’est uniquement parce que le processus qu’il faudrait enclencher pour y parvenir – l’abolition de la propriété privée bourgeoise et la collectivisation complète des moyens de production – irait à l’encontre des intérêts et de la volonté de la classe des capitalistes présentement au sommet de la société. En effet, en dépit de l’inefficacité et du désordre engendrés par la propriété privée des moyens de production (inefficacité qui se révèle au grand jour présentement alors que l’État bourgeois doit dicter aux capitalistes comment se comporter), la bourgeoisie a intérêt à ce que l’organisation capitaliste de la société soit maintenue puisqu’elle lui permet d’accumuler des richesses incommensurables en plus d’échapper à la nécessité de travailler et de produire. Pour réaliser tout le potentiel déjà contenu dans la société actuelle et satisfaire les besoins des masses, il faudra donc affronter ouvertement la classe capitaliste, la renverser et la soumettre par la force. En d’autres mots, il faudra que le prolétariat fasse la révolution et s’empare du pouvoir politique.

Si les États bourgeois acceptent présentement de mettre en œuvre des mesures aussi draconiennes et de restreindre comme ils le font la liberté économique des entreprises privées, ce n’est pas parce la bourgeoisie se soucie tout à coup du bien-être et de la vie des prolétaires qu’elle exploite en permanence. En réalité, outre le fait que la pandémie l’inquiète puisqu’elle est elle-même susceptible d’être affectée par la maladie (les virus ne font pas la différence entre les prolétaires et les bourgeois), la bourgeoisie a tout simplement jugé que les conséquences du laisser-faire, susceptible d’entraîner un véritable désastre sanitaire en plein cœur des pays impérialistes, allaient être plus dommageables que les conséquences d’une intervention robuste. En effet, des épidémiologistes ont évalué que la COVID-19 avait le potentiel d’atteindre rapidement de larges pans de la population des pays touchés et de provoquer une hécatombe massive si des mesures « d’endiguement » n’étaient pas mises en place. Par exemple, selon une projection rendue publique par l’Imperial College de Londres, le nombre de morts causés par l’épidémie, si aucune action n’était entreprise, allait s’élever à 510 000 en Grande-Bretagne et à 2,2 millions aux États-Unis. Et c’est sans parler des dommages économiques qui allaient être causés dans de tels scénarios. Il n’est donc pas surprenant que la bourgeoisie réagisse avec autant de vigueur et qu’elle accepte d’enfreindre ses propres règles pendant un certain temps.

La concentration économique des pays capitalistes prépare l’avènement du socialisme

L’une des caractéristiques les plus importantes des pays capitalistes avancés comme le Canada est le haut niveau de socialisation des forces productives qui s’y trouvent. Alors qu’à l’époque de l’émergence du capitalisme, l’économie était encore marquée par l’éparpillement et par la libre concurrence entre des entreprises isolées, ce sont aujourd’hui les grands monopoles et les grandes entités capitalistes qui dominent la vie économique. Ces grandes entités concentrent une quantité incroyable de moyens de production et rassemblent des masses d’ouvriers et de travailleurs, rendant ainsi possible l’application de techniques beaucoup plus avancées qu’avant dans le procès de production et permettant ainsi d’atteindre une productivité très élevée. Alors qu’aux premiers stades de développement du capitalisme, la libre concurrence et la fragmentation régnaient dans le procès social de production, l’émergence des monopoles et la concentration de l’économie tendent désormais à limiter la concurrence sous certains aspects (tout en l’exacerbant de manière générale) et rendent possible une certaine forme de « planification » économique. La socialisation de la production permet en effet de recueillir et de centraliser une immense quantité de données sur la vie sociale et de développer une connaissance scientifique de la société. Elles rendent possible la réalisation d’une comptabilité nationale précise, la réalisation de l’inventaire de tous les moyens de production et de toutes les marchandises produites sur le territoire, le recensement de l’ensemble de la population, de l’ensemble des travailleurs et des professionnels, etc. Aussi, le développement et la centralisation des moyens de communication favorisent une transmission extrêmement rapide de l’information, ce qui permet aux instances centrales de réajuster leur planification en fonction de la réalité sur le terrain et d’informer en temps réel l’ensemble de la population de leurs décisions. Le développement du capitalisme nous a donc conduits aux portes de la socialisation intégrale de la production. Tout est en place pour mettre en œuvre une planification rationnelle complète de l’économie. Dans les pays où règne le capitalisme monopoliste, les États bourgeois doivent déjà mettre en œuvre une forme de « planification » économique d’ensemble. Cependant, étant donné que la propriété privée des moyens de production existe encore, cette « planification » n’est que partielle et elle n’élimine pas le chaos inhérent au mode de production capitaliste. Surtout, elle est réalisée non pas dans l’intérêt de la majorité, mais bien dans celui de la minorité des capitalistes qui possèdent les monopoles et les grandes entreprises. C’est seulement lorsque le prolétariat aura conquit le pouvoir politique qu’il pourra mettre en œuvre une planification économique complète, une planification socialiste répondant aux besoins des masses populaires et des travailleurs.

Pour revenir à l’épisode actuel, les mesures prises par les gouvernements des provinces et par le gouvernement fédéral révèlent, plus clairement qu’à l’habitude, la facilité avec laquelle il serait possible d’exercer une planification centralisée dans un pays comme le Canada. C’est, par exemple, la possibilité de rassembler de l’information sur les stocks de marchandises disponibles sur le territoire et sur la capacité de production dans le secteur de l’alimentation qui a permis à l’État bourgeois québécois d’affirmer qu’il n’y aurait pas de pénurie alimentaire dans la province en raison de la COVID-19. De la même manière, c’est parce qu’il possède des données précises sur la circulation des biens au pays que le gouvernement fédéral a été en mesure d’évaluer l’impact de la fermeture de la frontière canado-américaine et d’assurer le maintien des chaînes d’approvisionnement (notamment en nourriture, en carburant et en médicaments) entre le Canada et les États-Unis.

Fait plus intéressant encore, le gouvernement fédéral a annoncé récemment la mise en place du « Plan canadien de mobilisation du secteur industriel » pour lutter contre la COVID-19. Il s’agit d’un plan visant à augmenter la production et l’approvisionnement de matériel médical au pays (masques, gants, respirateurs artificiels, désinfectant, etc.) en rehaussant la capacité de production des usines qui en fabriquent déjà, en convertissant les chaînes de production de certaines usines qui fabriquent autre chose et même en construisant de nouvelles unités de production. L’État subventionnera les achats qu’auront à faire les entreprises pour apporter les modifications nécessaires à leurs moyens de production. Par exemple, l’Association des fabricants de pièces automobiles s’est offerte pour produire de l’équipement médical plutôt que des pièces de voitures. Entre autres, les fabricants canadiens Martinrea et Magna International ont annoncé être disposés à transformer leurs chaînes de production pour fabriquer des respirateurs artificiels. Aussi, l’entreprise montréalaise Medicom, l’un des principaux fabricants et distributeurs de masques chirurgicaux au monde, a été ciblée par le gouvernement pour qu’elle sécurise l’approvisionnement au pays. L’entreprise possède six usines à travers le monde, mais aucune au Canada pour l’instant. À court terme, elle augmentera ses livraisons de masques et, à moyen terme, elle construira une nouvelle usine en sol canadien. Selon l’entreprise, la nouvelle usine devrait être opérationnelle d’ici quatre ou cinq mois, peut-être même moins. La compagnie torontoise Thornhill Medical, qui produit des respirateurs artificiels et des unités de soins intensifs portatives, a également été ciblée par le gouvernement et elle augmentera sa capacité de production. Aussi, une entreprise spécialisée dans le textile a annoncé pouvoir transformer sa production afin de fabriquer des gants de latex jetables. Finalement, dans la foulée de l’annonce du gouvernement fédéral, le gouvernement du Québec a affirmé avoir entamé des discussions avec des entreprises afin de leur demander de fabriquer des masques et des respirateurs dans la province. Le « Plan canadien de mobilisation du secteur industriel » révèle de façon éloquente que le degré élevé de développement et de concentration des forces productives au pays rend possible la réorganisation rapide de la production pour répondre à des besoins spécifiques, besoins qui sont connus grâce à cette même concentration des forces productives. On voit donc qu’il serait possible, en un tour de main, de satisfaire toutes sortes de besoins dans la société avec une véritable planification centralisée. En fait, c’est seulement parce que les décisions économiques sont prises en fonction des profits des capitalistes que cela ne se produit pas.

Pour faire face à la pandémie de COVID-19, la bourgeoisie profite actuellement de l’existence d’un réseau de la santé hautement socialisé. Au cœur de ce réseau se trouvent de grands centres hospitaliers regroupés au sein de vastes entités administratives (par exemple les CISSS/CIUSSS au Québec). Ces centres hospitaliers rassemblent des milliers d’employés et concentrent une quantité impressionnante de ressources et d’instruments de travail. La concentration des ressources et l’organisation centralisée du réseau permettent notamment de faire l’inventaire de tout le matériel médical disponible sur le territoire (écouvillons pour détecter la COVID-19, masques, blouses jetables, gants en nitrile, lits de soins intensifs et d’hospitalisation, ventilateurs, respirateurs artificiels, etc.), de répartir rationnellement ce matériel entres les différents centres hospitaliers, d’anticiper les besoins du réseau et de planifier l’attribution des soins. Au Québec, par exemple, le gouvernement a affirmé qu’il pourrait libérer 6 000 lits d’hospitalisation, sur les 18 000 dont la province dispose, afin de les rendre disponibles pour les patients atteints de la COVID-19. Les autorités ont également annoncé qu’elles se préparaient à ajouter 3 000 lits supplémentaires, notamment en réquisitionnant des hôtels privés ou en ouvrant des locaux modulaires. La centralisation du réseau de la santé permet également aux autorités de connaître en temps réel le nombre de personnes ayant passé un test de dépistage, le nombre de personnes dont l’infection est confirmée ainsi que le nombre exact de malades hospitalisés. Il leur est ainsi possible d’avoir une bonne idée de la progression de la maladie et d’ajuster leur planification en conséquence.

L’État possède une connaissance précise du nombre de travailleurs et de professionnels du réseau de la santé, de même que du nombre de spécialistes bourgeois disponibles sur le territoire. Pour faire face à la pandémie de COVID-19 et afin de combler le manque à gagner de personnel, le gouvernement du Québec a lancé un appel aux anciens travailleurs et aux anciens professionnels de la santé, les invitant à reprendre temporairement du service. Rapidement, quelque 10 000 personnes (principalement des infirmières retraitées ou qui ont quitté le réseau de la santé) se sont portées volontaires. En un claquement de doigts, les entraves bureaucratiques et financières habituellement en place ont été éliminées. Les travailleuses voulant être réintégrées dans le réseau n’ont désormais plus besoin de débourser d’argent pour obtenir à nouveau leur permis de pratique et pour être couvertes par les assurances de responsabilité professionnelle. En Ontario, après que le gouvernement ait fait un appel similaire, l’ordre des infirmières a accéléré son processus de réintégration des membres pour permettre aux infirmières non pratiquantes d’être réinscrites. Plus de 3 000 infirmières se sont rapidement manifestées. D’autres réformes ont été effectuées de manière accélérée pour augmenter la fluidité et l’efficacité du réseau. Au Québec, les infirmières peuvent maintenant signer des arrêts de travail, pratique réservée aux médecins en temps normal. Aussi, un projet de loi visant à donner plus de pouvoir aux infirmières praticiennes spécialisées ainsi qu’aux pharmaciens a été adopté en urgence à l’Assemblée nationale.

L’adoption extrêmement rapide de ces mesures donne un petit aperçu de tout ce qui serait possible de réaliser si la société n’était pas dirigée en fonction des intérêts des capitalistes. Avec un tel degré d’organisation et avec l’étendue des moyens disponibles, on peut se demander pourquoi il y a autant de problèmes dans le réseau de la santé en temps normal (surcharge de travail pour les infirmières et les préposées aux bénéficiaires, manque de ressources et de personnel, engorgement, etc.). La raison est simple : la planification actuelle n’est pas faite en fonction des intérêts des travailleurs et des travailleuses. Lorsque la société sera dirigée par le prolétariat, il sera possible non seulement de faire face plus facilement à des situations exceptionnelles comme celle que nous vivons présentement, mais aussi de solutionner tous les problèmes qui, dans la société actuelle où sévit l’exploitation, accablent les travailleurs et les travailleuses de la santé ainsi que les prolétaires qui ont besoin de soins. Il sera possible d’alléger grandement la charge de travail des infirmières et des préposées aux bénéficiaires en utilisant l’ensemble de la force de travail disponible, en répartissant les tâches à accomplir de manière rationnelle et en formant davantage de gens pour travailler dans le réseau. Considérant la productivité immense dont nous disposons à l’échelle nationale, il sera possible d’augmenter grandement la capacité du réseau en construisant de nouveaux hôpitaux et en produisant davantage de matériel médical. Il sera également possible de mettre fin aux cliniques privées et de réduire considérablement les salaires des médecins, des spécialistes et des cadres supérieurs afin d’utiliser les ressources dégagées pour servir le peuple. L’ensemble des services et tous les médicaments seront gratuits ou très accessibles. Et si nous avons à affronter de nouvelles épidémies importantes, les travailleurs et les travailleuses de la santé, contrairement à ce qui se produit actuellement, bénéficieront des meilleures protections possibles et seront rétribués à la hauteur de leurs efforts héroïques!

Les normes sociales et le dépérissement de l’État

Il est assez impressionnant de constater avec quelle rapidité de larges secteurs de la population canadienne (non seulement au sein de la bourgeoisie, mais aussi du prolétariat) ont appliqué les directives émises par l’exécutif gouvernemental et par la santé publique, et ce, sans que les autorités n’aient eu besoin de recourir à la répression ou à l’emploi de mesures coercitives. Des centaines de milliers, voire des millions de prolétaires ont assimilé les consignes émises par les autorités (ne pas se rassembler, rester le plus possible à la maison, s’isoler en cas d’infection au virus ou en cas de retour de voyage, adopter de nouvelles pratiques hygiéniques, etc.) et se sont mis à les faire respecter « spontanément » autour d’eux. La raison pour laquelle les choses se sont produites ainsi est somme toute plutôt simple : les gens ont rapidement considéré que les consignes des autorités sanitaires étaient sensées et qu’il était de leur devoir de les mettre en œuvre pour ne pas contribuer à la propagation du virus. En effet, l’objectif central poursuivi par ces mesures (empêcher la progression rapide de la maladie) ne va pas, en soi, à l’encontre des intérêts du peuple, et c’est pourquoi elles ont été appliquées. Plus encore, nous avons assisté à l’émergence très rapide d’un nouvel ensemble de normes sociales, c’est-à-dire de règles de conduite implicitement admises par une très large fraction de la population et dictant les comportements sociaux. Les gens ont accepté de voir leurs libertés individuelles restreintes puisque c’est le bien-être collectif qui le justifiait.

D’une certaine manière, ce phénomène nous donne un aperçu (partiel et imparfait) de la façon dont les choses vont se dérouler sous le socialisme et sous le communisme. Pour que la société puisse fonctionner, chacun ne peut pas faire ce qu’il veut, malgré ce qu’en pensent les idéologues libéraux et anarchistes. Cela est déjà vrai sous le capitalisme et cela le sera encore plus sous le socialisme. En effet, dans une société organisée et dirigée en fonction de l’intérêt des masses, il faudra, bien plus encore que présentement, accorder nos actions individuelles aux besoins de la collectivité. Pour que les besoins de l’ensemble des travailleurs puissent être satisfaits, il faudra accepter que la société impose des contraintes importantes aux individus. Il faudra reconnaître le caractère positif des normes et des règles – en autant qu’elles servent réellement l’intérêt du peuple et qu’elles puissent être appliquées de manière consciente et volontaire par les prolétaires. Bien sûr, après la prise du pouvoir par le prolétariat, certaines normes sociales propres à la société capitaliste disparaîtront et de nouvelles normes prolétariennes et communistes verront progressivement le jour. Par exemple, le fait de travailler pour servir le peuple et non pour son propre enrichissement constituera l’une de ces nouvelles normes sociales. Le fait de participer aux assemblées populaires et de prendre part aux décisions politiques et économiques en constituera une autre.

Sous le socialisme, l’avant-garde politique du prolétariat ainsi que les diverses instances exécutives de l’État prolétarien lanceront des mots d’ordre pour mobiliser les masses afin d’avancer dans la transformation des rapports sociaux et de poursuivre la lutte de classe contre la bourgeoisie. Un peu comme nous l’avons vu récemment, de larges fractions des masses vont assimiler ces mots d’ordre et vont les appliquer volontairement puisqu’ils correspondront à leurs intérêts de classe. C’est en entraînant ainsi dans l’action les prolétaires que les mots d’ordre politiques de l’avant-garde permettront de transformer positivement la société. En retour, les masses vont alimenter les instances centrales et leur avant-garde politique en exprimant leurs besoins et en dénonçant les cadres embourgeoisés ayant cessé de défendre les intérêts prolétariens. Loin d’être oppressif ou autoritaire comme veut nous le faire croire la bourgeoisie, ce dialogue permanent entre le prolétariat et son centre dirigeant permettra aux masses d’agir consciemment pour transformer le monde et pour éradiquer la bourgeoisie en tant que classe sociale exploiteuse. Plus encore, c’est la direction exercée par l’avant-garde sur les masses qui provoquera l’émergence de nouvelles normes communistes. Progressivement, ces nouvelles normes sociales prendront la place des mesures coercitives et de la contrainte économique jusqu’à ce qu’elles régissent chacun des aspects de la vie sociale. Par exemple, les gens ne travailleront plus parce qu’ils auront besoin d’un salaire et qu’ils craindront de manquer d’argent, mais plutôt parce qu’ils considéreront leur travail comme une source d’épanouissement et parce qu’ils seront conscients de la nécessité de travailler pour faire fonctionner la société. À ce moment, l’argent, les classes sociales ainsi que l’appareil répressif que l’on appelle l’État auront disparu et la société aura atteint le stade du communisme.

Avançons vers la prise du pouvoir et le socialisme!

L’épisode que nous traversons est sans contredit un moment tout à fait particulier dans l’histoire du capitalisme. Pour ceux et celles aspirant à transformer la société, il y aura beaucoup d’enseignements à en tirer. Notamment, les événements récents nous rappellent toute la puissance des formes d’organisation économiques que la société bourgeoise a développées, formes d’organisation dont le potentiel n’est que partiellement exploité dans les conditions de la propriété privée bourgeoise. Ils nous rappellent que la planification intégrale de l’économie est à portée de main et que seule la lutte pour la prise du pouvoir nous sépare du socialisme. Aussi, cet épisode nous rappelle l’incroyable capacité des masses à assimiler des mots d’ordre et à les mettre en application lorsqu’ils sont rationnels. Il démontre la force positive des normes sociales, lesquelles, lorsqu’elles sont fondées sur l’intérêt collectif et sur le bien-être du peuple, peuvent permettre de faire fonctionner « spontanément » de larges pans de la société (et éventuellement la société au complet) sans qu’il ne soit nécessaire de recourir à des mesures bureaucratiques et répressives. Pour la majorité des gens, ces normes sociales sont loin d’être oppressives. Bien au contraire, c’est leur existence et leur puissance qui permettent d’envisager le dépérissement de l’État une fois que les classes sociales auront disparu après la période de transition socialiste.

Finalement, l’épisode actuel nous renseigne sur la puissance des appareils administratifs développés par la bourgeoisie et sur leur capacité à réagir rapidement à des situations exceptionnelles. En l’espace de quelques jours, l’État bourgeois a réussi à opérer, bien que de manière chaotique, une réorganisation relativement étendue de la vie sociale, à faire des réaménagements importants et à donner des directives suivies par une large partie de la population. Cela dit, face à des problèmes comme celui posé par la pandémie de COVID-19, les institutions politiques que le prolétariat mettra en place sous le socialisme permettront de faire beaucoup plus et beaucoup mieux. Devant un défi sanitaire similaire, le pouvoir prolétarien réagira bien différemment de la façon dont réagit le pouvoir bourgeois présentement. En effet, sous le socialisme, les décisions seront prises avant tout en fonction du bien-être des prolétaires, et non pour assurer le maintien de l’exploitation capitaliste. Étant donné que la planification économique sera complète, et non seulement partielle et limitée comme c’est le cas aujourd’hui, il sera possible d’opérer une réorganisation beaucoup plus fluide de la société. Les répercussions économiques négatives liées à la propriété privée et à l’anarchie capitaliste n’auront pas lieu. Surtout, les mesures qui seront mises en place (fermetures, arrêt de certaines activités, limitation des rassemblements, etc.) n’affecteront pas les travailleurs de plein fouet comme c’est le cas actuellement. Par exemple, les travailleurs ne se retrouveront pas plongés dans l’incertitude et leur revenu sera garanti à 100%. Ceux devant assurer les tâches essentielles seront mieux protégés. Aussi, le travail à accomplir sera réparti rationnellement pour ne pas que certains travailleurs se retrouvent injustement surchargés et pour que les personnes vulnérables puissent demeurer à l’abri. Les denrées essentielles (comme la nourriture) pourront être distribuées gratuitement et systématiquement aux personnes en isolation par des brigades spéciales équipées pour se prémunir du virus. Et ainsi de suite!

De manière générale, le socialisme permettra de satisfaire l’ensemble des besoins du peuple. Dans chaque secteur, il éliminera les entraves inutiles à l’amélioration du bien-être des travailleurs et réorganisera les choses afin de faciliter leur vie. Il se servira des ressources déjà contenues dans la société bourgeoise et il en développera encore plus. Il permettra au prolétariat de prendre toutes les décisions économiques nécessaires à l’amélioration de ses conditions d’existence (gratuité de tel service, fixation du prix de telle marchandise, construction de nouvelles infrastructures, utilisation optimale de la force de travail disponible, etc.). Il mobilisera les masses en permanence pour régler tous les problèmes dans la société!