Projet de loi 34 : Hydro-Québec et la CAQ vont nous voler des millions de dollars supplémentaires!
La fin de semaine dernière, le gouvernement du Québec a adopté sous bâillon parlementaire le projet de loi 34, un projet de loi qui permettra à l’État bourgeois québécois de voler des millions de dollars supplémentaires aux prolétaires de la province. Déposé l’été dernier, ce projet de loi permettra à Hydro-Québec d’échapper à l’exercice annuel de fixement et de vérification des prix effectué par la Régie de l’énergie depuis 2003. De plus, le projet de loi prévoit des augmentations annuelles de 2% du coût de l’électricité à partir de 2021 – et des augmentations encore plus importantes si l’inflation est sévère. Ainsi, les hausses annuelles seront plus élevées que celles de la dernière décennie qui ne dépassaient pas l%. Rappelons que la Coalition Avenir Québec (CAQ), lorsqu’elle était dans l’opposition, avait elle-même calculé que Hydro-Québec avait prélevé 1,5 milliards de dollars excédentaires aux consommateurs durant les dernières années. Or, avec l’adoption du projet de loi 34, seulement 500 millions seront redonnés à la population – un « remboursement » qui prendra la forme d’un crédit sur la première facture d’électricité de 2020. Le projet de loi prévoit également un gel des tarifs en 2020, ce qui permettrait prétendument de combler la différence de 1 milliard. En réalité, le résultat de cette loi sera que la facture hivernale d’électricité, qui représentait déjà une somme considérable dans le budget des ménages prolétariens, sera encore plus salée qu’avant.
Cette manœuvre d’Hydro-Québec pour siphonner des millions supplémentaires n’est que la plus récente arnaque de l’entreprise d’État. Rappelons, par exemple, la formidable escroquerie que l’entreprise avait réussi à réaliser au début des années 2000 en opérant une division légale et comptable entre les opérations de production (HQ Production) et les opérations de distribution (HQ Distribution). Cette magouille avait permis à l’entreprise de maximiser ses profits en orchestrant la vente d’électricité de HQ Production à HQ Distribution, une transaction inutile précédant la vente d’électricité aux consommateurs et servant simplement à faire grossir la marge de manœuvre pour gonfler les prix. On peut également penser aux très rentables exportations vers le nord des États-Unis, lesquelles engendrent une pression énorme sur le réseau, ce qui a pour résultat de faire augmenter le prix de vente de l’électricité au Québec. Dans tous les cas, l’argent volé se retrouve dans le portefeuille des dirigeants d’Hydro-Québec. Ces manœuvres ne sont pas surprenantes : bien qu’il s’agisse d’une société d’État et bien qu’elle soit souvent présentée comme une entité au service du « bien commun », Hydro-Québec est une entreprise qui est régie, de la même manière que les autres, par les lois économiques du capitalisme.
Il est important de rappeler que le monopole d’État qu’est Hydro-Québec n’est pas du tout un outil entre les mains de la classe ouvrière québécoise. En effet, contrairement à ce que certains idéologues peuvent laisser croire, le contrôle populaire sur l’énergie n’est pas encore réalisé au Québec – ni au Canada d’ailleurs. Historiquement, le processus de nationalisation de l’hydro-électricité a joué un rôle fondamental dans la consolidation de la grande bourgeoisie québécoise et dans le développement du capitalisme au Québec. Depuis sa création, Hydro-Québec est l’instrument d’une classe sociale spécifique – la bourgeoisie québécoise –, et non pas une entité appartenant « à tout le monde » et servant le « bien commun » – quelque chose qui, de toute manière, n’existe pas dans une société divisée en classes sociales antagoniques. Aussi, bien qu’elle ait une forme étatique, ce qui sera également le cas d’une grande partie des entreprises après l’établissement du socialisme, l’appareil qu’est Hydro-Québec n’a rien de socialiste, contrairement à ce que plusieurs pensent erronément. En effet, sous le socialisme, les grands moyens de production seront étatisés, mais ils seront entre les mains d’un État prolétarien, c’est-à-dire un État dirigé par le prolétariat et formé de conseils révolutionnaires permettant la participation du peuple aux affaires communes. Finalement, il faut comprendre que la nationalisation opérée au début des années 1960 s’est faite en achetant à prix élevé aux compagnies privées d’électricité leurs infrastructures et leurs parts de marché, et donc en les payant avec la plus-value provenant du travail exploité de la classe ouvrière. C’est donc tout le contraire du processus d’expropriation de la bourgeoisie et de collectivisation des moyens de production que le prolétariat mettra en œuvre lorsqu’il prendra le pouvoir : ce processus consistera alors à arracher aux capitalistes leur propriété, et ce, sans les indemniser. Aujourd’hui, l’exploitation de la classe ouvrière se poursuit et Hydro-Québec demeure un appareil exclusivement au service de la classe exploiteuse.
Il est intéressant de préciser que Hydro-Québec, en plus d’être dans un rapport antagonique avec l’ensemble des travailleurs et des travailleuses, est aussi au cœur de conflits et de luttes au sein de la bourgeoisie. Les divergences concernant Hydro-Québec au sein de la bourgeoisie portent sur le prix de l’électricité, sur l’encadrement du monopole et la législation qui l’entoure ainsi que sur la question de son éventuelle privatisation. Il faut comprendre que le projet de loi 34 est avant tout le produit de cette lutte plutôt que le résultat d’une véritable intention de remettre les trop-perçus au peuple du Québec, comme l’avait prétendu trompeusement la CAQ pendant la campagne électorale. Cette lutte se déroule entre le secteur bourgeois directement lié à l’appareil d’État et les partisans de la privatisation ou d’un encadrement serré d’Hydro-Québec. Cette ligne de fracture au sein de la bourgeoisie apparaît clairement avec l’offensive menée par les coalitions de groupes de consommateurs contre le projet de loi 34. Ceux-ci ont déposé formellement des requêtes à la Régie pour étudier une baisse des coûts d’électricité. À l’avant-garde de ces coalitions se trouvent des regroupements d’entreprises industrielles et commerciales tels que la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) et l’Association québécoise des consommateurs industriels d’électricité (AQCIE). Ces entreprises représentent du capital de grandeur moyenne ayant de la difficulté à s’adapter lorsque le coût de l’électricité augmente, à la différence du grand capital qui est en mesure de trouver des sources d’énergie complémentaires comme le gaz-propane, ce qui lui donne une plus grande flexibilité. Le capital financier, quant à lui, aimerait voir la privatisation d’Hydro-Québec, qui lui donnerait la possibilité d’y investir massivement et d’aller chercher ainsi des milliards de dollars supplémentaires.
Il n’en demeure pas moins que les études mises de l’avant par ces groupes d’industriels et de commerçants sont révélatrices et sont bien utiles lorsqu’on les étudie avec précaution et en gardant en tête d’où elles proviennent. Selon la FCEI, le trop-perçu d’Hydro-Québec sera encore de 624 millions de dollars en 2020-2021. Contrairement à ce qui est prévu dans le projet de loi 34, il faudrait, toujours selon la FCEI, baisser les tarifs de 4,9% en 2020-2021, ce qui montre que le gel des tarifs en 2020 est loin de compenser le 1 milliard de trop-perçu comme le prétend la CAQ. Aussi, la Régie de l’énergie est normalement censée fixer annuellement les prix de l’électricité – un processus demandant environ 8 mois. Le projet de loi 34 modifie le processus de fixation des prix en le confiant à la législature. Cette année, Hydro-Québec n’a même pas déposé de dossier tarifaire devant la Régie de l’énergie, en prétextant le dépôt, l’été dernier, du projet de loi 34. Il faut ainsi comprendre que Hydro-Québec est en lutte ouverte contre la Régie de l’énergie et cherche à s’y soustraire pour parvenir à percevoir le plus d’argent possible. Pourtant, la Régie de l’énergie est loin de proposer un prix correct et suffisamment bas pour le prolétariat, ce qui montre l’ampleur de la rapacité des dirigeants de l’entreprise d’État.
Au final, il est clair que les masses populaires vont ressortir perdantes de ces manœuvres et de ces luttes internes à la bourgeoisie. Les prolétaires paient déjà l’électricité à un prix incroyablement élevé comparativement à ce qu’ils devraient débourser si la production était entre les mains de la classe ouvrière. Ils vont maintenant payer encore plus cher dans les années à venir. Quand on met bout à bout l’augmentation du prix de l’électricité, du gaz et de l’essence, la hausse du coût du transport en commun et du panier d’épicerie ainsi que celle des loyers et des taxes municipales, on arrive à une somme d’argent considérable. Ces augmentations constituent autant d’attaques contre le prolétariat et auxquelles il est absolument légitime de résister. Aussi, pour mettre fin une fois pour toutes à ces attaques, le prolétariat doit s’organiser en tant que classe et lutter pour prendre le pouvoir dans une révolution. Lorsque les communistes parlent de nationaliser les industries, ils font référence à la création de quelque chose de bien différent des entreprises d’État comme Hydro-Québec. Répétons-le : le contrôle populaire sur l’énergie est une tâche encore à réaliser. Cette tâche, ce n’est pas la bourgeoisie québécoise qui va l’accomplir, mais bien le prolétariat révolutionnaire!
Dénonçons Hydro-Québec et la CAQ qui s’apprêtent à siphonner des millions supplémentaires au prolétariat du Québec!
Luttons pour la révolution prolétarienne afin de mettre en place le contrôle populaire sur l’énergie!